Ce n’est pas comme s’ils n’avaient pas prévenu, il y a un panneau qui dit, attention marcheurs randonneurs flâneurs, ici, il y a souvent des orages, ça leur prend comme ça, vu que toutes les conditions sont là pour que ça éclate : un canyon, l’air frais en haut l’air brûlant en bas ou quelque chose comme ça en tout cas, je ne me suis pas éternisée devant ce panneau, mais bref, cet endroit c’est super pour les orages et donc ça éclate.
Les photos sur le moment ont quelque chose de métallique, effectivement. Je vous montrerai. Mais pour la nuit, j’erre un peu dans les paysages et vais me percher ailleurs.
Les masses d’air déferlent en avalanche, ça fait quelque chose d’une violence inouïe, à la fois grandes marées et tourbillons de neige, et pourtant, ça fait plusieurs heures que je regarde ces nuages et rien ne change, l’avalanche d’air est figée, plantée là, agrippée aux sommets ; rien ne bouge sauf le bleu de la nuit qui tombe, et encore, ce n’est pas un mouvement, ce n’est pas vraiment tomber, c’est plus comme si la lumière s’évaporait et qu’une autre s’y substituait doucement sans qu’on s’en rende vraiment compte, ce n’est pas non plus disparaître, c’est plus muer peut-être ?
Il y a cet orage immobile à ma fenêtre qui ne finit pas d’être une avalanche, il y a les masses ébènes des montagnes, et surtout, tout en bas, il y a six lueurs dans la nuit, six petites ponctuations de rien du tout qui disent, finalement, après l’orage, après la nuit, sois tranquille, il y a demain qui t’attend.