Silence radio
Au début, je me disais, une petite heure par semaine. C’est pas très contraignant. Ça te forcera à prendre du temps, toi qui dis que tu en trouves jamais quand t’en as besoin. Alors oui c’est assez irrégulier, parfois les mots viennent tout seuls, parfois avant c’était le bon moment et quelque fois j’ai l’angoisse du curseur qui clignote sur une fausse page blanche.
Cette semaine, j’ai envie de me taire. De ne rien écrire. Je veux ne rien avoir à dire, je ne veux même pas qu’on me demande mon avis, ni même en avoir un. J’ai envie de silence écrit, de non-dits non-écrits, j’ai besoin de réfléchir pour continuer à avancer calmement.
J’ai quelques millions d’idées qui bourdonnent dans ma tête, comme des abeilles autour d’une fleur, et puis elles s’en vont, elles ne laissent qu’un souvenir diffus.
Je ne veux pas parler de toutes ces nouveautés qui chamboulent mes tâtonnements, comme si j’avais besoin de me rappeler mon manque d’assurance, qui commence le lundi et qui finit le vendredi. Des fois je me sens comme dans une scène où je serais sur un pont en corde au-dessus du vide, avec au fond une rivière et des cailloux, un coup de vent et tout craque, et je m’accroche comme je peux à ce qu’il reste du pont, avec mon sac à dos de randonnée sur le dos (détail d’importance). Bref.
Si vous me demandez comment on gère ses angoisses dans la vie, je n’ai pas la solution, je ne l’ai jamais trouvée, c’est pas faute de chercher tous les jours, de boire de la tisane camomille-verveine avec du miel dans mon fauteuil en laissant filer le temps et les journées, vous voyez, j’essaye vraiment.
Ce que je continue d’apprendre et de pratiquer, c’est que les erreurs forgent, qu’il ne faut pas être trop dur avec soi-même mais qu’on a bien le droit de s’exaspérer de ses propres conneries.
Du coup comme je n’ai pas envie de parler, je mets une photo loupée. J’en ai quelques unes comme ça que j’aurais vraiment aimé réussir, mais qui ne le sont pas. Si on veut, on n’a qu’à dire que c’est la démarche artistique qui compte, c’est ce qu’on ressent plutôt que ce qu’on voit effectivement.
La fin de l’histoire du pont je la vois comme ça, je grimpe le long de la corde et je n’ai même pas besoin de me délester de mon sac à dos de rando (de toute façon je l’aime trop). Une main m’aide une fois presque arrivée. Je longe la rive, je n’ai même plus le vertige au passage, et puis je trouverai bien une manière de traverser. Alors je me calme, je me remets en marche et veirèm ben.
infos : Sony A7ii + FE 24-240, 240mm, ISO 640, f/6,3, 1/125s.