Je regarde le flamand rester longtemps la tête sous l’eau et je me dis
Incroyable comme ce flamand ressemble à une autruche ! Pensez ce que vous voulez, et après mes loupés précédents, vous me concèderez au moins ça, mes yeux voient bien ce qu’ils veulent, après tout ; mais là il en a vraiment tout l’air, d’être une autruche, comme ça là planté immobile la tête figée dans l’eau ; je vois bien un flamand un vrai, mais pourtant quelque chose me souffle pendant que je le fixe que c’est une autruche. Allez comprendre. En tout cas, je souris et je me dis, Quelle belle allégorie, et Ce coucher de soleil d’hiver est magnifique, Ça vaudra bien quelques mots, même si la photo est somme toute assez banale.
Quelle joie de savoir que la tête sous l’eau ou dans la vase, pendant que je trouve avec certitude qu’il fait l’autruche, il se nourrit et que de par cette nourriture — merci les crustacés, mollusques, insectes, vers annélides et surtout Artemia Salina pour la collaboration — il permet à son gris initial de se métamorphoser en rose…
Non pas que j’aie quelque chose contre le gris, ni pour le rose, ou l’inverse, mais je me dis On peut être gris se nourrir et devenir rose sans changer fondamentalement pour autant — je me le note pour les jours de grand cafard il y en a toujours — je trouve ça très beau en soi, l’évidence forcée de cette métamorphose.
Allongée dans le van avec vue sur chevaux-taureaux et cinq rangées de barbelés, quelques mois après la photo, je lis un livre sur les oiseaux de Camargue.
Je souris. J’ai trouvé ce qu’il manquait pour pouvoir écrire ce tout petit texte, en coup de vent. J’ai même rigolé toute seule, et les chevaux sont venus me voir après ça, ils voulaient sans doute que je leur raconte — dans le doute, je l’ai fait.
Flamand rose, Phoenicopterus roseus.
Avec un nom pareil…